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Analyse du vocabulaire : Matthieu 15.24

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Analyse du vocabulaire : Matthieu 15.24 Empty Analyse du vocabulaire : Matthieu 15.24

Message par منصور Mar 17 Déc - 4:00

السلام عليكم ورحمة الله وبركاته

Nous allons voir que la traduction reflète peu ce que dit la version syriaque de cet évangile, version héritière de la tradition sémitique de l'évangile de Jésus. Cette version sémitique, nommée la Peshitta, est antérieure à l'établissement du dogme chrétien, par des conciles romains, pour tout l'empire romain. L'évangile de Matthieu existait sous une forme grecque, celle de Luc issue de celle de Marc, également sémitique. Il s'agissait alors aux conciles d'harmoniser les récits des évangiles, de faire correspondre les versets et le sens de ceux-ci, et d'ajouter des versets pour des raisons dogmatiques. A partir de là, le sens des termes sémitiques ont dû s'ajuster au sens des versets en grec, et les dictionnaires que nous avons pour l'araméen et le syriaque reflètent cette influence grecque et chrétienne romaine.
Nous allons ici comparer le sens du vocabulaire de la Peshitta selon un texte antérieur, en hébreu, le Tanakh, et un texte postérieur, le Qur'an, en arabe. Nous aurons la trajectoire et évolution du sens que prennent les termes sémitiques.


Matthieu 15.24
ܗܽܘ ܕ݁ܶܝܢ ܥܢܳܐ ܘܶܐܡܰܪ ܠܗܽܘܢ ܠܳܐ ܐܶܫܬ݁ܰܕ݁ܪܶܬ݂ ܐܶܠܳܐ ܠܘܳܬ݂ ܥܶܪܒ݁ܶܐ ܕ݁ܰܛܥܰܘ ܡܶܢ ܒ݁ܶܝܬ݂ ܐܺܝܣܪܳܝܶܠ
Jésus répondit et dit : "Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël".



Nous avons un 1er syntagme ;

ܗܽܘ ܕ݁ܶܝܢ ܥܢܳܐ


C'est une phrase nominale, commençant par un pronom :

- ܗܽܘ (hwu)pronom 3ème personne masculin singulier Il ou Lui, aucune anomalie sémantique ici, mêmes lettres en hébreu הוא (hwa)et arabe, et arabe هوَ un h et un w (prononcé ou) ;
- ܕ݁ܶܝܢ en hébreu דינ et arabe دين, tous prononcés dyn, et nous voilà dans une première anomalie sémantique. Si en hébreu et arabe, le sens est identique ce qui est pris en compte pour un jugement et rendre des comptes, en quoi le terme araméen et syriaque ܕ݁ܶܝܢ donnerait mais, pourtant et ce serait une préposition, une conjonction de coordination ? Pour tenter de la comprendre, analysons le contexte dans lequel il agit, grâce au terme qui le suit ;
- ܥܢܳܐ (a'na) en hébreu avec le même sens עָנָה qui est verbe pour sens répondre, attester, parler, crier, en arabe le terme عنى a un sens beaucoup plus restrictif, avec pour champ sémantique concerner, être sujet à une affaire, c'est la condition de celui à qui est posé une question.
Le sens araméen et syriaque de ܕ݁ܶܝܢ (mais, pourtant) ne fait pas sens dans ce contexte.

Puis vient une phrase verbale commençant par ܘܶܐܡܰܪ :

- ܘܶ (wa) conjonction de coordination, comme en hébreu et arabe, traduit généralement par et mais qui prend ici le sens d'un événement consécutif, entrainant une conséquence, indiquant la dépendance à la phrase précédente ;
- ܐܡܰܪ (amara) comme en hébreu, généralement traduit par dire, mais aussi annoncer, affirmer qui là, rejoint le sens en arabe أمر commander, ordonner, un dire mais solennel venant d'une autorité, une déclaration. Avec le sens de أمر, le terme ܕ݁ܶܝܢ peut alors avoir du sens, car en hébreu et arabe, ce terme indique ce qui fait autorité, la capacité à juger une affaire.
ܗܽܘ ܕ݁ܶܝܢ ܥܢܳܐ nous aurions le pronom ܗܽܘ Lui (Jésus) et son qualifiant ܕ݁ܶܝܢ, celui pouvant juger une affaire, puis vient le verbe de cette phrase nominal ܥܢܳܐ que nous pouvons traduire par solliciter, sens restreint se trouvant en araméen, hébreu et arabe.

La phrase ܐܡܰܪ ܠܗܽܘܢ :
- ܐܡܰܪ (amara) verbe au passé, et son agent 3ème personne du masculin singulier, non signifié mais implicite ;
- ܠ (L) comme en hébreu et arabe, avec le sens de pour (dédié à), suivi du pronom masculin 3ème personne du pluriel ܗܽܘܢ ils, eux : : Il a déclaré pour eux, il leur a déclaré.

ܠܳܐ ܐܶܫܬ݁ܰܕ݁ܪܶܬ݂ ܐܶܠܳܐ ܠܘܳܬ݂ ܥܶܪܒ݁ܶܐ ܕ݁ܰܛܥܰܘ ܡܶܢ ܒ݁ܶܝܬ݂ ܐܺܝܣܪܳܝܶܠ

L'objet du verbe ܐܡܰܪ est une phrase dépendante d'une négation ܠܳܐ (laa), de même en hébreu et arabe, et elle introduit les phrases verbales au passé, indiquant une négation ferme :

- ܐܶܫܬ݁ܰܕ݁ܪܶܬ݂ (éstadrét) verbe au passé, et l'agent du verbe 1ère personne du singulier, signifié par le ܬ݂ suffixé, de racine ܫܕ݁ܪ (SDR), traduit par envoyer et nous avons là la plus grosse anomalie rencontrée dans ce verset. Nous avons en hébreu שְׂרָד et en arabe سرد le fait d'entrelacer, de tresser, d'insérer une chose à une autre, comme le font les maillons d'une chaine. Le sens restreint est le relai. Les traducteurs de la Peshitta et de l'élaboration des dictionnaires syriaques n'ont pas fait de recherche sémantique, et peu baignés dans la culture sémitique, car ce terme ne signifie pas envoyer. Le champ sémantique est bien celui de répéter une action, de la prolonger, une succession, le fait de relayer. Ajoutons le schème trouvé ici, identifiable par deux affixes ܐܫܬ݁ܕܪ la a préfixé et le t infixé, ce qui correspond à la forme VIII en arabe, une forme qui indique que l'agent du verbe a été programmé pour faire l'action, il n'en est pas le décideur.

Puis suit l'objet du verbe qui démarre par la particule de l'exception, sauf, excepté :
- ܐܶܠܳܐ (élaa) en hébreu אֶלָּא (élaa) et signalons que les ܐܶ et en hébreu אֶ ne sont pas un a ou é mais un hamza ء qui vient avec la voyelle é qui est assimilé à un i pour l'arabe إِلا (ilaa).

Suit l'objet de l'exception, ܠܘܳܬ݂ ܥܶܪܒ݁ܶܐ ܕ݁ܰܛܥܰܘ :

- ܠܘܳܬ݂ (lwat) en hébreu לְוָת (léwat) tout deux traduits par vers avec le l indiquant une dédication, et le terme arabe ليت et لوت indique une destination restrictive, une limitation, une exclusivité. ܠܘܳܬ݂ pourrait signifier, vers uniquement ;
- ܥܶܪܒ݁ܶܐ (é'rbaa) et le ܐ (aa) suffixé est un déterminant, pour la racine ܪܒ݁ܐ en hébreu ערב en arabe عرب racine qui est celle du mot Arabe
Voilà un terme qui est double en hébreu, car la lettre ע a la valeur sémantique de ce qui est visible, le sème de la perception, le ع, que l'arabe distingue de la lettre غ qui au contraire, le sème de ce qui n'est pas visible. Voilà pourquoi ערב peut signifie multitude en araméen et hébreu, sens trouvé dans ce verset, mais aussi soir, le moment où tout se couvre d'obscurité, en arabe غرب. De fait, ܥܶܪܒ݁ܶܐ ne signifie donc pas brebis, mais le troupeau.
Rappelons que l'Eternel a fait une promesse à Abraham, lui donner une descendance nombreuse, voilà pourquoi les descendants d'Ismaël sont appelés arabes, terme composé à partir de l'étymon רב ou رب:


16.10 בְּרֵאשִׁית
וַיֹּאמֶר לָהּ מַלְאַךְ יְהוָה הַרְבָּה אַרְבֶּה אֶת זַרְעֵךְ וְלֹא יִסָּפֵר מֵרֹב
L'ange de l'Éternel lui dit : « Je multiplierai ta postérité, et elle sera si nombreuse qu'on ne pourra la dénombrer ».

12.38 שְׁמוֹת
וְגַם עֵרֶב רַב עָלָה אִתָּם וְצֹאן וּבָקָר מִקְנֶה כָּבֵד מְאֹד
Une multitude nombreuse de gens montèrent avec eux. Ils avaient aussi des troupeaux considérables de brebis et de boeufs.


Mêmes si des rabbins, pour des raisons idéologiques, nient le sens du mot arabe en hébreu, la Torah témoignent contre eux.


- ܕ݁ܰܛܥܰܘ vient indiquer de quel type de multitude il s'agit, par la préposition préfixée ܕ݁ܰ suivit du terme ܛܥܰܘ (Ta'w) en hébreu טָעוּ en arabe طغو, là encore la lettre غ n'est pas identifiée et distinguée en hébreu, et ici en araméen également. Le sens en hébreu et araméen est l'égarement, mais en arabe il exprime l'excès, sortir des limites.

Puis vient la description de qui il s'agit ܡܶܢ ܒ݁ܶܝܬ݂ ܐܺܝܣܪܳܝܶܠ :

- ܡܶܢ (mén) en hébreu מִן (min) et arabe مِن (min), préposition indiquant une origine, une provenance d'une catégorie, traduit par de ;
- ܒ݁ܶܝܬ݂ (béyt) en hébreu בַּֽיִת (béyt) et arabe بَيت (baiyt), qui est le lieu où l'on réside (de nuit), mais ici il indique un clan ;
- ܐܺܝܣܪܳܝܶܠ (Israiyl) en hébreu יִשְׂרָאֵל (Isiraaél) en arabe إِسْرَائِيلَ (Israaiyl). La signification précise de ce nom composé demande un article dédié.



Conclusion

La traduction est face à une incapacité à refléter le sens exacte des textes sémitiques, Torah, Evangile ou Qur'an. On ajoute à ça que le dogme gréco-romain, le christianisme, a fait dériver le sens des mots sémitiques pour mieux correspondre à leur idéologie, ce qui se passe également pour le rabbinisme moderne vis-à-vis du Tanakh. Pour retrouver le cadre sémitique du sens du vocabulaire, nous devons étudier le champ sémantique d'un terme précis, qui va de l'hébreu antique jusqu'à l'arabe du 7ème siècle, celui du Qur'an.

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